États-Unis
Planter des forêts peut-il contribuer à résoudre le problème du réchauffement planétaire? Oui et non, semblent affirmer deux articles parus dans deux revues différentes. Le premier article, paru dans le Science du 10 novembre, s'intéresse à l'Amérique du Nord, où beaucoup de gaz carbonique a été effectivement emprisonné par la croissance des forêts sur des fermes abandonnées. Mais attention, souligne une autre recherche publiée dans le Nature du 9 novembre : les forêts réfléchissent moins le Soleil que les terres cultivées, de sorte qu'elles contribuent au réchauffement!
Le premier article, par John Casperen, de l'Université Princeton, au États-Unis, s'intéresse au cas nord-américain. Bien que ce soit l'une des régions les plus polluantes au monde, elle a absorbé, au cours du XXe siècle, plus de gaz carbonique qu'elle n'en a émis. Cette découverte, faite en 1996, a été attribuée au fait qu'une atmosphère riche en gaz carbonique stimule la croissance des arbres, qui se servent de ce carbone pour fabriquer leurs tissus ligneux.
On croyait que cet effet stimulant expliquait de 25 à 75% du bilan de carbone positif de l'Amérique du Nord. Mais l'étude de John Casperen infirme cette thèse : les arbres poussent aujourd'hui à peine plus vite qu'il y a 100 ans et la stimulation n'est que de 2%. Pour comprend pourquoi tant de carbone est resté emprisonné sur le continent, il faut plutôt regarder du côté de l'usage du sol. Depuis 1900, beaucoup de terres marginales défrichées au XIXe siècle ont été abandonnées. Les arbres y ont repoussé, capturant de grandes quantités de carbone. Mais ces forêts sont maintenant adultes et elles n'en absorberont plus autant.
La seconde étude, réalisée par Richard Betts, du Centre Hadley pour la recherche et la prédiction climatique, en Grande-Bretagne, ne nie pas que les forêts absorbent du carbone. Mais elle conclut que l'effet sur le réchauffement planétaire est nul, ou même négatif. Bref, que les forêts contribuent au réchauffement à leur manière. Et c'est particulièrement vrai de la forêt boréale, au Canada et en Sibérie.
En hiver, les terres cultivées, une fois couvertes de neige, sont parfaitement blanches. Elles réfléchissent vers l'espace presque tout le Soleil qui y plombe, contribuant du coup à refroidir le climat. Mais les forêts de conifères, très sombres, absorbent la chaleur solaire. L'effet peut sembler négligeable, dans le chercheur a calculé que là où l'hiver est très long, le réchauffement induit par les conifères dépasse le refroidissement obtenu par l'absorption de gaz carbonique lors de leur croissance. Les effets des plantations de forêts sur le réchauffement doivent donc tenir compte de la lumière réfléchie, ce que personne ne fait encore.
Philippe Gauthier